République du Congo Mission du Fonds Monétaire International Du 20 Février au 8 Mars 2017
République du Congo Mission du Fonds Monétaire International
Du 20 Février au 8 Mars 2017
Une mission1 du Fonds Monétaire International (FMI) s'est rendue à Brazzaville du 20 février au 8 mars 2017 pour ouvrir et conclure des négociations bilatérales avec la République du Congo afin de mieux structurer l’ajustement de la République du Congo dans le contexte des efforts régionaux, tel que stipulé à l’article 13 du communiqué du Sommet des Chefs d’État de la CEMAC le 23 décembre 2016. La mission a contribué à la réflexion en cours sur l’évaluation de la situation économique et financière en 2016 et des perspectives pour 2017 et le moyen terme. Cet Aide-Mémoire résume les conclusions préliminaires de la mission. La baisse des prix internationaux du pétrole inflige des difficultés considérables à l'économie de la République du Congo, qui s’est fortement contracté en 2016. Le choc pétrolier est intervenu pendant que les autorités déployaient des efforts considérables visant à améliorer la base infrastructurelle du pays, augmenter les salaires des fonctionnaires et améliorer les conditions de vie des populations, surtout les plus vulnérables. Après un fléchissement significatif en 2015, la croissance économique est devenue négative en 2016, pour la première fois depuis plusieurs années. 1.
Selon les estimations préliminaires de la mission, la croissance économique s’est établie à -2,7 pourcent en 2016, avec une baisse de 3,3 pourcent de l'activité économique non pétrolière. La croissance a été négative dans tous les secteurs, à l'exception notable de l'agriculture. L’activité dans le secteur de la foresterie, la deuxième source de recettes d'exportation de la République du Congo, s'est également contractée. Les discussions avec le secteur privé formel suggèrent une baisse plus prononcée du chiffre d'affaires et des licenciements importants dus à la baisse des prix du pétrole, à la baisse de la demande publique et à l'accumulation des arriérés du gouvernement. En dépit de la baisse marquée de la croissance et de la demande publique et privée, l’inflation a augmenté au cours du premier semestre de 2016 à cause de la perturbation du transport de marchandises liée aux problèmes de sécurité.
Malgré les efforts d’ajustement significatif des autorités, la perte des réserves internationales s’est accélérée en 2016. Les chiffres préliminaires de l’exécution du budget montrent un ajustement important du déficit budgétaire primaire hors pétrole qui est passé de 47,8 du PIB non pétrolier (29,0 pourcent du PIB total) en 2015 à 39,9 1 La mission était composée de Mr. Abdoul Aziz Wane (chef de mission), Mme. Luisa Charry, Mr. Mohamed Babatunde Gado, Mr. Guy Jenkinson, Mr. Charalambos Tsangarides, Mr. Phillippe Egoume Bossogo, Mr. Klaus Hellwig, et de Mr. Jules Tchicaya-Gondhet de Trebaud (bureau de la représentation résidente du FMI à Brazzaville). 2 pourcent du PIB non pétrolier (25,5 pourcent du PIB total) en 2016. Les recettes du gouvernement ont baissé de façon significative en valeur nominale, mais le gouvernement a réduit de moitié, à 14,3 pourcent du PIB non pétrolier, l’effort d'investissement financé sur ressources domestiques.
La croissance du crédit à l'économie s’est également ralentie de façon significative. En conséquence, les réserves internationales imputées au Congo ont baissé de 1.380 milliards de francs CFA en 2015 à 519 milliards de francs CFA, ne couvrant plus que deux mois d’importations. En dépit de l’ajustement budgétaire, le gouvernement a accumulé des arriérés importants vis-à-vis de ses créanciers. Les arriérés extérieurs, estimés à 56,2 milliards de FCFA, sont dus à cinq créanciers bilatéraux, quatre multilatéraux et de nombreux créanciers commerciaux.
Selon des indications préliminaires du secteur privé formel, des arriérés intérieurs encore plus importants ont été accumulés en 2016. Les pressions sur la liquidité des banques et sur la santé du système financier ont augmenté. Les créances en souffrance ont augmenté de 30 pourcent, tandis que le ratio de couverture a diminué. Moins de la moitié des banques du système respectent toutes les normes prudentielles. Les prêts improductifs et les créances douteuses ont augmenté à mesure que l'accumulation des arriérés du gouvernement a eu une incidence négative sur les bilans des entreprises privées. La croissance économique devrait retrouver progressivement son niveau de long terme, si les déséquilibres macroéconomiques sont corrigés rapidement pour maintenir et renforcer la confiance des investisseurs.
La croissance du secteur non pétrolier est prévue à -0,5 pourcent en 2017 et devrait continuer à augmenter. La prévision reflète l’effet de l’ajustement budgétaire nécessaire pour restaurer la confiance des investisseurs et l'impact positif des investissements passés sur la croissance. En particulier, l'achèvement récent des projets d'infrastructure tels que les 1.100 kilomètres de route reliant Pointe Noire, Brazzaville et Ouesso, aura des effets durables sur l'économie. L’augmentation rapide des investissements dans le pétrole devrait ralentir dans la mesure où les grands projets pétroliers sont sur le point de commencer la production. La croissance à moyen terme devrait atteindre environ 3 pourcent en moyenne.
Ces projections de croissance se fondent sur un ajustement budgétaire significatif. Cet ajustement est nécessaire pour porter les réserves internationales de la République du Congo à 3 mois d’importation en 2019, en ligne avec les objectifs régionaux. En plus de l’objectif régional sur les réserves, l’ajustement est nécessaire pour réhabiliter les finances publiques et assurer la soutenabilité de la dette, améliorer la confiance des investisseurs et la capacité de l’économie à sécréter suffisamment de 3 ressources pour les investissements dans le capital physique et humain. Pour atteindre ces objectifs, le déficit budgétaire primaire hors pétrole devrait baisser de 39,9 pourcent du PIB hors pétrole en 2016 à 13,5 pourcent du PIB hors pétrole en 2017.
Un retard dans la mise en œuvre de cet ajustement aurait des conséquences néfastes pour l’économie. Retarder l'ajustement permettra de maintenir la croissance à court terme, mais les réserves imputées de la République du Congo pourraient être complétement épuisées dans les 12 prochains mois et le poids de la dette deviendrait rapidement insoutenable. La croissance fléchirait alors rapidement et les solutions de sortie d’une telle crise jointe de la dette et des réserves seraient beaucoup plus difficiles à formuler et mettre en œuvre. Compte tenu de l’ampleur de la réduction nécessaire du déficit, des efforts soutenus sont requis tant au niveau des recettes qu’à celui des dépenses. Au niveau des recettes, la mission a pris bonne note du potentiel fiscal existant, notamment dans le domaine des exonérations.
Elle a encouragé les autorités à déployer tous les efforts nécessaires pour exploiter ce potentiel, en particulier à travers une élimination des exonérations exceptionnelles ou discrétionnaires. Elle estime qu’une amélioration des recettes non pétrolières de 1½ de pourcentage du PIB est possible en 2017 déjà si des efforts soutenus sont mis en œuvre. Une rationalisation des dépenses budgétaires financées sur ressources domestiques devra donc être réalisée pour dégager environ 8,7 pourcent du PIB non pétrolier. Par ailleurs, la mission suppose que toutes les dépenses publiques seraient exécutées exclusivement à travers le budget de l’État. Un besoin de financement résiduel de 1.053 milliards de francs CFA (environ 1,7 milliards de dollars américains) se dégage après cet effort d’ajustement. Ce besoin de financement pour 2017-2020 devrait être couvert pour éviter un ajustement trop brutal et assurer que les dépenses prioritaires d’investissement et celles des secteurs sociaux (santé, éducation, filets sociaux, etc.) sont couverts de manière adéquate.
La couverture de ce besoin par des financements adéquats devra également permettre de repayer les arriérés extérieurs et en partie les arriérés intérieurs. La finalisation d’un échéancier de remboursement des arriérés intérieurs et un remboursement partiel en 2017 donnerait un signal positif fort aux investisseurs. Ce besoin de financement ne comprend cependant pas les besoins de recapitalisation des banques publiques qui devront être évalués en consultation avec les organisations régionales de supervision bancaires. Les difficultés financières qui perdurent au niveau de plusieurs entités publiques (compagnies aériennes publiques, compagnies ferroviaires, fonds de sécurité sociale, etc.) représente des sources supplémentaires de risques budgétaires. Le risque de surendettement du Congo, qui était estimé "modéré" lors de la dernière évaluation faite en 2015 par le FMI et la Banque Mondiale, pourrait être plus négative lors de la prochaine évaluation. La mission du FMI a discuté avec les autorités une Analyse 4 de la Viabilité de la Dette (AVD) préliminaire. Le risque de surendettement de la République du Congo pourrait être classé comme "en détresse", si les arriérés accumulés depuis 2016 demeurent impayés et si l’effort d’ajustement n’est pas fait immédiatement pour faire baisser la dette publique par rapport à la capacité de l’économie. L’analyse de la dette a également montré que le service de la dette extérieure sur les quatre prochaines années représente plus de 2 milliards de dollars américains, soit un tiers des recettes hors pétrole et plus d’un cinquième des recettes totales collectées sur ces prochaines années.
La mission du FMI a réaffirmé aux autorités Congolaises les engagements pris par la Directrice Générale du FMI auprès des Chefs d’État à Yaoundé. En particulier, elle a réitéré la disponibilité des services du FMI à appuyer le gouvernement dans la mise en œuvre d’un programme de rétablissement des équilibres extérieurs de la région tout en promouvant les dépenses sociales et l’investissement public. Elle a encouragé les autorités à faire les efforts nécessaires pour permettre au Chef de l’État de continuer à jouer le rôle de leader que ses pairs lui ont confié pour la formulation et la mise en œuvre de mesures de rétablissement les équilibres extérieurs de la CEMAC et relancer la croissance.
La mission a insisté sur la préservation des investissements prioritaires dans le court terme et l’augmentation des dépenses sociales. Elle a également indiqué que le rééquilibrage des comptes budgétaires permettra d’améliorer de façon significative les perspectives de développement économique et social et les conditions de vie des populations, surtout les plus démunies. La mission a encouragé les autorités à améliorer les statistiques économiques et financières. En particulier, la mission a noté les faiblesses notoires au niveau des statistiques sur les comptes nationaux qui ont ralenti les travaux de la mission et qui augmentent de façon notoire l’incertitude autour des estimations de la mission. La mission a discuté les besoins d’assistance technique et invite les autorités à préciser ces besoins et à les soumettre aux départements concernés du FMI. La mission a regretté la non mise à disposition de certaines informations cruciales portant sur les transactions financières de l’État liées au pétrole.
Elle a demandé à plusieurs reprises, en vain, la situation du compte du gouvernement en Chine qui reçoit une partie des recettes de la vente du pétrole en Chine et finance l’exécution de projets en République du Congo. Ella a aussi demandé, sans réponse positive, le bilan financier de la SNPC. Il en va de même concernant le récent prêt consenti par Afreximbank. Elle prend note de la réponse des autorités que ces informations doivent être fournies par le ministre des finances qui était absent pendant de la mission.
Elle espère recevoir ces informations dès que possible afin de finaliser l’évaluation des perspectives économiques et financières. La mission prend note de la volonté des autorités à poursuivre et finaliser rapidement les discussions. Les autorités ont indiqué que dans les 10 prochains jours, elles proposeront un calendrier pour finaliser les discussions avec le FMI dans le contexte de l’ajustement au niveau régional. Les autorités ont indiqué qu’elles sont disposées à venir à au siège du FMI à Washington pour clore les discussions rapidement.
5 La mission a été reçue en audience par le Premier Ministre, son Excellence Monsieur Clément Mouamba. Elle a rencontré le Ministre d'Etat de l'Économie, du Développement industriel et de la Promotion du secteur privé, M. Ondongo; le Ministre de la Planification, de la Statistique et de l'Intégration, Mme Ebouka-Babackas, Ministre par intérim des Finances; le Ministre de l’aménagement du territoire et des grands travaux, M. Bouya ; le Ministre de la Santé et de la Population, Mme. Mikolo ; le Ministre des Affaires Sociales, de l’Action Humanitaire et de la Solidarité, Mme. Dinga-Dzondo ; et de hauts fonctionnaires des ministères de l’économie, des finances, du plan, de la Direction nationale de la BEAC, ainsi que des représentants du secteur privé et des partenaires au développement.
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