RDC : 17 morts à Kinshasa avant une manifestation anti-Kabila, trois policiers tués
Des heurts sanglants ont opposé lundi matin de jeunes manifestants d'opposition à la police anti-émeute à Kinshasa avant une manifestation hostile au président congolais Joseph Kabila. Le dernier bilan fait état de 17 morts selon le ministre de l'Intérieur congolais, Evariste Boshab, dont 14 civils et 3 policiers. La manifestation prévue n'a pas eu lieu. Un peu plus tôt dans la journée, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement congolais, avait annoncé son annulation.
Vers 11 heures (midi à Paris), les policiers dispersaient à coup de grenades lacrymogènes plusieurs centaines de personnes qui leur lançaient des pierres et tentaient d'avancer vers le Palais du Peuple (Parlement), selon des journalistes sur place. Un peu plus tôt, sur une grande artère du centre de la capitale de la République démocratique du Congo, des affrontements similaires avaient mis aux prises les forces de l'ordre et quelques dizaines de manifestants lançant en français ou en lingala des «Kabila akende !» et «Kabila dégage !»
Au milieu des effluves roses des gaz tirés par les forces de l'ordre, émergeaient des drapeaux blanc et bleu de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti d'Étienne Tshisekedi, figure historique de l'opposition congolaise. Avant les affrontements, des journalistes ont vu un minibus et une voiture incendiés à Limete, le quartier du siège de l'UDPS, dans le centre-ouest de Kinshasa.
A l'échangeur de Limete, point de départ de la manifestation censée commencer à 13 heures (14 heures à Paris), des manifestants ont mis le feu à une affiche montrant un portrait géant du président appelant au «dialogue» pour surmonter la crise politique que traverse le pays depuis sa réélection contestée en novembre 2011.
Sur le boulevard Lumumba, la grande artère de Limete, plusieurs pneus ont été incendiés sur la chaussée en divers endroits et des jeunes filtraient les rares voitures qui circulaient, ne laissant passer que les journalistes. De source diplomatique, on signalait aussi des échauffourées plus au sud en «divers endroits» sur la route menant à l'aéroport.
«Préavis»
Réuni autour de M. Tshisekedi, un «Rassemblement» des principaux partis d'opposition a appelé à manifester lundi 19 Septembre 2016 dans tout le Congo pour signifier à M. Kabila son «préavis», trois mois avant l'expiration de son mandat, le 20 décembre, et exiger la convocation de la présidentielle censée avoir lieu avant cette date.
Arrivé au pouvoir en 2001 après l'assassinat de son père Laurent-Désiré Kabila, M. Kabila est âgé de 45 ans. La Constitution congolaise lui interdit de se représenter mais il ne donne aucun signe de vouloir quitter le pouvoir. Alors que la présidentielle apparaît impossible à tenir dans les temps, le «Rassemblement» constitué autour de M. Tshisekedi refuse le «dialogue national» en cours à Kinshasa entre la majorité et une partie de l'opposition.
Ce forum est censé déboucher sur un «accord politique» de sortie de crise et ouvrir la voie à des élections «apaisées» mais retardées. Il devait s'achever samedi, mais les négociateurs ne sont pas encore parvenus à s'entendre sur tous les points à l'ordre du jour, et le travail sur le calendrier des élections devait reprendre lundi à Kinshasa. Mégapole de 10 millions d'habitants habitués aux violences à caractère politique, Kinshasa avait des airs de ville morte lundi.
Dans plusieurs quartiers, les écoles étaient désertées par les élèves, les parents préférant les garder à la maison. De nombreuses boutiques étaient fermées, la circulation était presque inexistante. Faute de clients, quelques taxis (peu nombreux) cassaient leur prix. Une atmosphère semblable régnait à Lubumbashi, la deuxième ville du pays, dans le sud-est, où des soldats sont venus renforcer en masse la police autour des principaux bâtiments publics et dans les quartiers réputés acquis à l'opposition.
Alors que toute manifestation était interdite, le gouverneur provincial, Jean-Claude Kasembe, a appelé la population a vaquer «librement» à ses occupations habituelles, mais les habitants semblent avoir fait majoritairement le choix de rester chez eux. A Bukavu, dans l'est du pays, quelque 300 personnes manifestaient à la mi-journée pour demander le «respect de la Constitution» avec des urnes en toile pour dire que la tenue de la présidentielle dans le délai est encore possible.
Leparisien.fr avec AFP
RDC : Kamerhe pourrait être privé de la primature ce 19 septembre 2016
Et si finalement, à son grand dam, Vital Kamerhe aurait fait le sale boulot à la place de Tshisekedi ? Quand il avait exigé un dialogue avec le pouvoir avec, in fine, un partage probable du pouvoir, le coriace opposant prenait le risque de cautionner un glissement rendu « inévitable » par Joseph Kabila. Le sphinx de Limete y aurait laissé l’immense popularité dont il jouit auprès de ses concitoyens. Finalement, c’est Vital Kamerhe qui est allé au dialogue pour un scénario sans suspense : Kabila aura une rallonge et le patron de l’UNC le poste du premier ministre. Mais, Le Rassemblement pourrait l’en priver et les chances d’un tel retournement de situations ne sont pas négligeables.
L’accord sorti du dialogue sera irréversible même dans ses aspects qui récompensent la stratégie de Joseph Kabila de rendre les délais constitutionnels impossibles à tenir. Cet accord est et sera, malgré tout, considéré comme un moindre mal. La gourmandise de la majorité s’en trouve contenue et il ne resterait plus que des dates des scrutins et du départ de la présidence de Joseph Kabila soient fixées pour que la très grande majorité de Congolais se résolvent à faire avec. La caution de la communauté internationale déjà acquise contribuerait à rassurer les Congolais mais peut-être pas assez pour les dissuader à manifester leur hostilité vis-à-vis du pouvoir. La manifestation prévue par Le Rassemblement ce 19 septembre 2016 répondra en partie à cette question et pourrait avoir des incidences inattendues et contraindre le président congolais à une cohabitation, mais pas celle qu’il a envisagée avec son ancien obligé surnommé sévèrement Kamérhéon.
Même s’il ne l’avouera jamais l’accord conclu au dialogue arrange la coalition construite autour de Tshisekedi. Le sale boulot qui était inévitable a été accompli par Vital Kamerhe et la communauté internationale ainsi que les Congolais n’accepteraient sans doute pas une remise à plat qui provoquerait beaucoup d’incertitudes et une plus longue période de transition. L’enjeu pour Le Rassemblement serait de mobiliser fortement la rue en vue de se rendre incontournable dans la gestion de la transition. Un scénario très envisageable si l’opinion montre un fort rejet de l’ancien président de l’assemblée nationale à qui on reproche la connivence avec le pouvoir, un lien qui n’aurait jamais été rompu selon ses détracteurs.
La seule réussite de la manifestation de ce 19 septembre 2016 ne suffirait pas, il faudrait une forte pression sur la durée et sans doute aussi une conjonction avec ces feux qui commencent à s’allumer un peu partout comme à Kasumbalesa, à Bukavu… et à des centaines d’autres qui couvent ça et là.|Botowamungu Kalome (AEM)
Lire : RDC : l’opposition à Joseph Kabila à nouveau dans la rue
C’est donc aux cris de « Kabila dégage ! » ou « Kabila doit partir ! » que des jeunes lançaient, lundi matin, des pierres sur les policiers qui répliquaient à coup de grenades lacrymogènes sur le boulevard Lumumba, grande artère du centre de la capitale de la République démocratique du Congo. Au milieu des effluves roses des gaz tirés par les forces de l’ordre émergeaient des drapeaux blanc et bleu de l’UDPS, le parti d’Etienne Tshisekedi, figure historique de l’opposition congolaise.
Plus tôt dans la journée, des voitures ont également été incendiées dans le quartier de Limete à Kinshasa. A l’échangeur de Limete, d’où devait partir la manifestation, plusieurs dizaines de jeunes, pour beaucoup avec des pierres à la main, scandaient des slogans hostiles au chef de l’Etat, en français et en lingala.
Les manifestants ont mis le feu à une affiche géante montrant un portrait du président appelant au « dialogue » pour surmonter la crise politique que traverse le pays depuis sa réélection contestée en novembre 2011. Sur le boulevard Lumumba, la grande artère de Limete, plusieurs pneus ont été incendiés sur la chaussée en divers endroits et des jeunes, se présentant comme des partisans de l’opposition, filtraient les voitures, ne laissant passer que les journalistes.
Lire : En RDC, un début de « dialogue national » boycotté par une grande partie de l’opposition
Human Rights Watch appelle à respecter les libertés
Dimanche, l’organisation américaine Human Rights Watch (HRW) a appelé les autorités congolaises à respecter les « libertés d’expression et de réunion, et autoriser le déroulement de manifestations pacifiques et de meetings politiques », pour « contribuer à prévenir les violences ».
« Les décisions que le président Kabila et son gouvernement vont prendre dans les prochaines semaines peuvent faire toute la différence pour l’avenir de la RDC », estime HRW dans ce texte intitulé « La République démocratique du Congo au bord du précipice ». L’organisation appelle également les autorités congolaises à « mettre fin à la répression et à promouvoir les principes démocratiques ». « Il s’agit d’une opportunité cruciale pour le pays pour consolider la démocratie, l’Etat de droit, et les droits humains, pour son propre futur et celui de la région entière », ajoute HRW.
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