Les belles feuilles du livre « Les assassins du Cardinal-terreur sur Brazzaville- » de Hervé Zebrowski, qui exposent les vraies raisons et les circonstances de la mort des présidents Marien Ngouabi, Alphonse Massamba Débat et du cardinal Emile Biayenda en 1977.

Question à Monseigneur NKOMBO Pourquoi ont-ils tué le président Marien Ngouabi, l’ancien présent Alphonse Massamba Débat et le cardinal Biayenda ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (pages 254-255) : « …En 1977, le cardinal Biayenda avait réussi à toucher le cœur de deux  de nos dirigeants d’alors : le président Marien Ngouabi et l’ancien président Alphonse Massamba Débat. Il avait convaincu en profondeur ces deux chefs du Congo, profondément choqués et perdus par l’échec total des 17 premières années d’indépendance, de se convertir vraiment à Christ. « Seul Jésus pourra vous permettre de sauver notre peuple », leur avait-il dit avec toute sa foi. Sous le regard du cardinal, Ngouabi et Massamba Débat définirent secrètement une constitution qui entendait sortir le Congo de l’impasse du communisme. Le cardinal avait béni ce projet de constitution.

 Mais, au Congo le malin est puissant et il veille. Un homme, le plus fort d’entre nous, entretient des relations avec ces puissances du mal. Cet homme fut informé du projet. Il s’assura du soutien des forces cubaines alors présentes au Congo Communiste pour tuer ce projet.

C’est ainsi, le 17 mars, en fin de matinée, Marien Ngouabi et Massamba Débat furent assassinés par quelques Congolais voués aux forces de la mort.

Question de Hervé Zebrowski : Pourriez-vous être plus précis Monseigneur ? Qui sont ces forces du mal ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255) : Ces forces du mal sont celles de la mort. Dans certains de nos rituels africains, des hommes appellent ces forces du mal et de la mort. Et tu peux me croire Hervé, ces forces sont celles du Diables, et elles répondent.

Question d’Hervé Zebrowski : Il suffit de croire au mal ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255) : Non, il ne suffit pas de croire au mal. Il faut ardemment désirer le mal et la mort. Je n’ai jamais vu Dieu, personne n’a jamais vu Dieu, mais vois-tu, je désire Dieu de toutes mes forces, ce Dieu incarné en Jésus. Le mal, Hervé, je peux te l’assurer, lui je l’ai vu, il existe. Ce mal là, seul Jésus a le pouvoir de l’écarter. Sans lui, il nous emporte.

Question : Comment est mort le président  Marien Ngouabi ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255) : Le 17 mars, en fin de matinée, Marien Ngouabi fut rejoint dans l’hôtel où il se trouvait, par une dizaine de militaires, tous sous l’emprise du grand féticheur du Khani. Ils blessèrent à mort le président. Défiguré, mâchoire fracassée, il fut ramené à sa résidence de la présidence de la République, où sa propre garde cubaine l’acheva.

Question d’Hervé Zebrowski : Pourquoi les Congolais n’ont-ils pas achevé eux-mêmes le président Marien Ngouabi ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255) : Parce qu’il s’agissait d’un chef politique. Dans ce crime, ces Congolais associés au Diable voulaient aussi associer les Cubains. Une sorte de pacte de sang signé avec Cuba, qui mouillaient tout le monde.

Question : Comment est mort l’ancien président  Massamba Débat ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255) : On ne sait pas comment fut assassiné Massamba Débat, dont le corps ne fut jamais retrouvé.

Question : Mais pourquoi ont-ils tué le Cardinal ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 254) : Ils ont tué Biayenda parce que c’était un saint. Un homme qui portait l’Évangile, un homme qui était l’Évangile. Un homme qui transformait les cœurs les plus endurcis. Vois-tu Hervé, Biayenda a réussi là où moi-même j’ai échoué.

Question : Et pour le cardinal Emile Biayenda, que s’est-il passé exactement ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255-256) : Lui s’est différent. C’était un chef religieux, une affaire strictement congolaise. Le chef de la religion du mal devait, pour installer son pouvoir, tuer le chef de la religion du Bien, incarné en la personne de Biayenda. Il ne s’agit pas là d’un assassinat bête et brutal, commis par des soldats ivres à la solde d’un mercenaire. Il s’agit d’un terrible sacrifice humain qui s’inscrit dans des liturgies de l’effroi. Car c’est dans l’effroi que surgit le diable.

C’est ainsi que ces hommes perdus appellent les forces du mal à leur service. Dans la nuit du 17 mars 1977, quelques heures après avoir tué Ngouabi, le grand  prêtre des forces du Mal, le grand chef du Khani, a envoyé des hommes à l’archevêché où dormait Biayenda. Personne ne savait alors que Ngouabi venait d’être assassiné. Le cardinal ne se méfia pas de ces hommes qui venaient le chercher. Le grand chef du mal, caché derrière son masque du ministre de la défense, appelait Biayenda en urgence.

C’est dans la confiance qu’il accepta de les suivre. Arrivé à la hauteur du cimetière Ntchémé Talangaï, un barrage arrêta sa voiture. Ayant compris sans doute ce qui se passait là, ce qui l’attendait devant ce cimetière, le cardinal réussit à déjouer le barrage et à poursuivre sa route. Quelques kilomètres plus loin, il fit vite arrêter sa voiture pour s’enfuir dans la brousse vers la montagne appelée aujourd’hui « Montagne du Cardinal ».

Mais il fut vite rattrapé par les hommes du Khani. Ils se saisirent de lui et l’emmenèrent jusqu’aux cimetières, qui est l’un des lieux privilégié où ils célèbrent et appellent les forces du mal. Ces cérémonies sont toujours nocturnes. Une tombe y était creusée. Le chef des forces du mal ordonna à Biayenda de s’y coucher. Une rafale de mitrailleuse fut tirée à côté pour l’effrayer et afin qu’il s’exécute mais le cardinal refusa. Il fut brutalement jeté dans la tombe. Là il s’agenouilla et pria, tandis que les forces du Mal, sous le regard de leur grand chef, psalmodiaient lentement leurs incantations que  le diable entend, tout en remplissant la fosse.

C’est deux jours après seulement que le cardinal fut retrouvé dans cette tombe. Il était à genoux, sa main droite loin de son visage, mais à hauteur de son visage. Je sais qu’en cette dernière heure qui fut la sienne, il bénissait ces hommes perdus et terrifiés, à qui il fit face jusqu’au bout. « Seigneur, pardonnez leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Question : Comment avez-vous appris ce qui s’est passé cette nuit là ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 255-256) : A l’époque, j’avais trente six ans, j’étais prêtre fonctionnaire de l’Etat congolais. J’avais choisi de travailler dans la fonction publique car là se trouvait l’élite du pays. Là je pouvais exercer une pastorale efficace, enracinée au cœur de la pâte humaine qui s’efforçait de construire le Congo moderne. Vois-tu, j’appartiens à une génération des prêtres-ouvriers en France. En ma qualité des prêtres, beaucoup d’hommes venaient se confier à moi. Quelques hommes perdus, soldats et fonctionnaires terrifiés par le geste qu’ils avaient commis, bouleversés par la prière du cardinal à genoux dans la fosse, sont venus me confier leur crime insupportable….

Dès que j’ai connu les circonstances exactes de ce crime, je m’en suis ouvert à Monseigneur Firmin Singha, l’ami le plus proche du cardinal. Ils s’aimaient ces deux hommes, ils avaient le même âge, ils étaient l’un et l’autre mes guides, mes pères spirituels, à la source même de ma vocation sacerdotale. Monseigneur Singa a su informer le Vatican. Il y était écouté parce qu’on le savait très proche du Cardinal.

Question : Mais où-est Monseigneur Singa aujourd’hui ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 257) : Il est mort en 1993 alors qu’il était évêque de Pointe-Noire.

Question : De quoi est-il mort ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 257) : Il mort empoisonné.

Question : Empoisonné par les hommes du Khani ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 257) : Oui. Par les hommes du Khani.

Question : Mais le Khani, il avait été chassé du pouvoir par vous-même en 1991 lorsque vous aviez pris la tête du pays afin d’organiser l’alternance démocratique ?      

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 257) : C’est exact .Mais le Khani n’était pas mort. Il était là, présent au Congo, et il continuait son œuvre de division et de mort. Il a même réussi  à troubler et s’allier certaines consciences sacerdotales. Le Khani m’avait « driblé ».  Ernest NKOMBO aimait le football et il utilisait volontiers cette métaphore empruntée à ce jeu d’équipe.

Question : Que voulez vous dire par là ? Comment le Khani vous a-t-il trompé ?

Réponse d’Ernest NKOMBO (page 258) : l’homme qui était habité par le Khani avait exprimé tous ses remords, toute sa contrition pour les crimes commis dans les années quatre vingt et notamment le crime du Cardinal qui fut le plus emblématique. Mais il a recommencé, et il plus fort que jamais à Brazzaville. Je n’ai pas pu sauver cet homme de la perdition dans laquelle le Khani l’entraînait. La foi m’a sans doute manqué. Là est mon échec, là est mon péché. Aujourd’hui, tout le peuple a peur et tout le peuple m’a abandonné parce que les forces m’ont manqué.

-C’est vrai que j’ai protégé sa vie à celui-là, répondit Nkombo. Sans moi, le peuple l’aurait tué.

Interrogation d’Hervé Zebrowski  (Page 259-260): La France avait-elle été informée des circonstances effroyables de l’assassinat du Cardinal Biayenda ? En d’autres termes, est-ce que cet holocauste était resté une affaire connue de quelques congolais et de quelques cardinaux autour du Pape ?

Je décidais d’aller interroger le frère Paul à la congrégation des spiritains, rue Lhomond à Paris. J’ai pour le frère Paul une grande affection. C’est un homme doux, entièrement engagé dans la mission de contrôleur financier de la congrégation des pères du Saint Esprit ( …). Anciens professeurs de mathématiques, le père Paul avait découvert le Congo dans les années 80 où il séjourna près de dix ans (…). «  Frère Paul », lui demandais-je en rédigeant mon chèque habituel,« saviez-vous comment est mort le cardinal Biayenda ? » Il parut gêné par ma question. Il me regarda un court instant puis, baissant les yeux, me répondit : « il est vrai qu’il n’était pas tout à fait mort quand ils l’ont enterré. » Vous voulez dire qu’il était parfaitement vivant ?  Il ne fit plus un commentaire. J’avais touché, sans aucun doute, un point douloureux de  sa conscience de serviteur de la communauté du Saint Esprit.

Ainsi donc, j’apprenais par le frère Paul que les circonstances de la mort du Cardinal étaient parfaitement connues par les spiritains français, et donc par la République française. La congrégation des spiritains est toujours restée aux ordres de la République française. Rien n’a changé depuis que le père Libermann la vendit au Ministère de la Marine dans les années 1850. Le Vatican, rappelons-le fit mis devant le fait accompli.

Les belles feuilles du livre « Les assassins du Cardinal-terreur sur Brazzaville- » de Hervé Zebrowski

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