Cela faisait des mois que la communauté internationale réclamait un calendrier de toutes les élections à venir en RDC. La Commission électorale nationale indépendante (Ceni) l’a finalement publié ce jeudi 12 février. L’annonce la plus attendue est sans conteste celle de la présidentielle à laquelle le président sortant Joseph Kabila n’a plus le droit de se présenter. Cette présidentielle devrait donc se tenir le 27 novembre 2016 tel que l’exige la Constitution.
Le 27 novembre 2016, cela fera cinq ans jour pour jour que Joseph Kabila a été réélu, le 28 novembre 2011. Ce sera donc la date de la prochaine présidentielle mais aussi des législatives, a annoncé la Céni devant une assemblée d’ambassadeurs et de représentants de la société civile congolaise.
La Céni a par ailleurs affirmé vouloir répondre à trois exigences : assurer la régularités des élections, achever le cycle électoral démarré en 2011, mais aussi et surtout respecter les échéances constitutionnelles pour la présidentielle.
La date de la présidentielle est donc désormais connue, mais pas seulement car, en tout, cinq scrutins ont été annoncés. Elections locales, provinciales et municipales prévues en octobre 2015, mais aussi sénatoriales ainsi que l’élection des gouverneurs en 2016, avant la présidentielle et les législatives, en novembre 2016. Cette annonce était très attendue par l’opposition et la communauté internationale tant les suspicions d’un troisième mandat pour Joseph Kabila ont été fortes ces derniers mois.
Aujourd’hui, beaucoup se sont donc dit rassurés par ce premier pas, même si les inquiétudes autour de la tenue de ces élections sont loin d’être levées. En effet, la commission électorale elle-même a reconnu qu’il y avait un certain nombre de « contraintes » à surmonter pour organiser tous ces scrutins. Ont tout d’abord été mentionnées des contraintes financières. Le budget pour financer ces élections est estimé à plus d’un milliard de dollars. Une somme gigantesque que le gouvernement va devoir débloquer. Autre contrainte, celle que le Parlement adopte un certain nombre de lois notamment sur la répartition des sièges au sein de l’Assemblée nationale, un pré-requis important pour l’organisation des législatives. Enfin, il faut mettre à jour le fichier électoral et savoir à quelle date limite ce fichier électoral sera–t-il clôturé.
Voilà quelques unes des questions qui restent ouvertes et qui font déjà craindre, à certains, toujours la possibilité d’un glissement du calendrier électoral.
Réactions prudentes
La publication d’un calendrier électoral a été accueilli avec prudence par un certain nombre d'acteurs. C'est le cas de la plateforme de la société civile « Agir pour des élections transparentes et apaisées ». Son directeur exectutif, Gérard Bisambu
se dit rassuré qu’il y ait désormais un calendrier, mais les incertitudes restent nombreuses
L'alliance des partis de l'opposition togolaise Cap 2015 conteste le calendrier des élections.
Au Togo, le processus électoral est en marche. La révision des listes d’électeurs devra s'achever le 23 février et la Commission électorale nationale indépendante (Céni) a proposé au gouvernement, à l'issue d'une réunion mercredi 11 février, la date du 21 avril pour la tenue du scrutin présidentiel. Seulement, des représentants de l'opposition contestent cette date, estimant que la Céni est hors des délais fixés par la Constitution et ne peut plus proposer de date. Ils l'ont signifié au président de la Céni par courrier.
Dans ce courrier adressé au président de la Céni et dont RFI s’est procuré la copie, les cinq membres signataires de la lettre déclarent se désolidariser de la suite du calendrier fixant la date du scrutin présidentiel au 21 avril 2015.
« Il faut une date pour aller aux élections, il faut s’en remettre à la classe politique. Nous, au niveau des partis politiques représentés au CAP 2015, nous constatons que nous n’avons plus les moyens juridiques pour proposer au gouvernement une date. Une voie qui permettra de faire cela n’est que la violation de la Constitution togolaise », juge Edem Atantsi, de l'Alliance nationale pour le changement (ANC), un des signataires.
Logiciel défaillant
Selon le chronogramme établi, les candidatures doivent s’ouvrir le 24 février, soit 24 heures après la fin de la révision des listes électorales. Pour les signataires, le délai constitutionnel ne peut être tenu pour l’organisation d’une telle élection.
Par ailleurs, depuis plusieurs semaines, le Parti des Togolais met en cause la fiabilité du logiciel qui sert à réaliser la révision de ces listes électorales. Cette élection est capitale, juge Nathaniel Olympio du Parti des Congolais, qui demande à avoir accès au fichier. « Je peux vous affirmer, après avoir vu comment les choses se déroulent sur le terrain, que ce logiciel présente des failles qui permettent à un individu de pouvoir s’inscrire plusieurs fois », alerte-t-il.
La Commission électorale nationale indépendante, pour sa part, continue son travail et devra soumettre cette date au gouvernement dans les prochains jours.
Pierre Nkurunziza, le président burundais.
Au Burundi, le président Pierre Nkurunziza, à la tête de ce pays depuis dix ans, n’a jamais caché son intention de briguer un troisième mandat lors de la présidentielle prévue en juin. Il s’appuie sur un article de la Constitution qui serait ambigu selon lui, malgré les protestations de la société civile ou de l’opposition.
Personne ne se fait guère d’illusion au Burundi depuis bien longtemps sur la volonté du président Pierre Nkurunziza de rempiler. Il y a une semaine, le collectif « Campagne citoyenne, Non à un troisième mandat » lui a donc écrit une lettre plutôt discrète. Il n’a pas reçu de réponse, mais cette fois, ces organisations de la société civile du Burundi interpellent publiquement le chef de l’Etat burundais pour lui demander de prendre exemple sur son voisin de RDC, Joseph Kabila, et renoncer définitivement à son projet.
La mobilisation est la clé pour Vital Nshimirimana, l’un des leaders du collectif : « Il n’est pas encore tard. Nous lui demandons de sortir de son silence pour annoncer qu’il renonce officiellement à briguer le 3e mandat, auquel cas il aura prévenu une violence qui est vraiment évidente. »
« Inéluctable » également, selon cette figure de la société civile burundaise, qui rappelle à Nkurunziza que c’est la pression populaire qui a dissuadé le président congolais de rester au pouvoir. « Les Burundais sont déterminés à lui faire barrage parce que les Burundais n’ont rien de différent avec les Congolais, les Burkinabè, les Maliens, lorsqu’il s’agit de défendre leurs droits, l’avenir du pays », prévient Vital Nshimirimana.
Mais ce combat s’annonce très rude. A quatre mois de la présidentielle au Burundi, le camp de Pierre Nkurunziza n’a rien prévu pour sa succession. Il serait plutôt en train de préparer secrètement à cette bataille, malgré les dénégations de ses proches.
Rwanda: campagne dans la presse pour un 3e mandat du président Kagame.
Le président rwandais, Paul Kagame.
Après la demande de trois partis satellites du pouvoir de lancer un débat sur la réforme de la Constitution ouvrant la voie à un 3e mandat pour Paul Kagame, c'est via la presse que des voix s'élèvent pour prôner le maintien du président en exercice. Pourtant, au Rwanda, cette question est rarement abordée publiquement. A chaque fois que l'on lui pose la question, Paul Kagame reste lui aussi énigmatique.
Les tribunes et commentaires s'enchaînent dans le journal pro-gouvernemental le New Times. Elles émanent d'un fonctionnaire rwandais, d'un ancien ministre des Finances ou encore d'un commissaire du Front patriotique rwandais, FPR. Toutes encensent le président Paul Kagame mettant en avant un chef de l’Etat sauveur du pays, artisan des succès économiques et protecteur face aux ennemis du Rwanda.
« S'aventurer dans l'inconnu pour le plaisir de changer serait suicidaire, irrationnel et déraisonnable », estime l'un des auteurs. « Est-il temps pour Paul Kagame de quitter ses fonctions en 2017 ? La réponse est non », conclut un autre partisan. Et tous ont ce même refrain : la décision d'un référendum appartient aux Rwandais.
Que signifient ces tribunes coup sur coup ? Le FPR « essaie de convaincre les Rwandais, de les habituer à l'idée », croit savoir Robert Mugabe, journaliste rwandais. « Faux », rétorque un officiel du parti au pouvoir : ce ne sont que des positions personnelles, des initiatives individuelles. « Il est normal que les Rwandais débattent », assure-t-il.
Reste que, dans un pays où les voix discordantes peinent à se faire entendre, le débat risque fort d'être à sens unique.